Quart de fesse Rémo Gary
C’est un petit livre que j’ai écrit il y a un peu plus d’un an. C’est poético-politique, en voici un extrait.
On aura besoin de toutes, de tous, de tout, démineurs de fond des choses, équarrisseurs de conscience, bonimenteurs, donneurs de biens, vrais monnayeurs, voleurs de domiciles, planteurs de canne à promenades, conducteurs de fils, épelucheurs d’ours d’enfants, épépineurs de soucis, effeuilleurs de papier, buveurs de tasses. Des paveurs d’intentions, porteuses d’espoir ras bord, des qui font des perles avec les écailles des ablettes, des chanteuses irréalistes, des tordus du redressement, des rouleurs dans la farine, coiffeurs de crin, coupeuses de chevaux en quatre, les tamiseurs de Londres, tous les métiers de la Seine, bateliers d’eaux troubles, des puisatiers de doutes, des fuiteurs de vielles nouvelles. Des annonceurs pas légaux, d’alertes lanceuses d’alerte, de poids, des maçonnes ambidextres, des intellectruelles, des sous directeurs de ressources inhumaines, des raconteuses d’histoires à dormir couché, des promotteuses immobiles, mannequines, pompières, médecines, dockères, chiffonnières, fantassines, des écosseurs de rugby, des ovalistes, des sportifs de bulle de haut niveau . Des rumeurologues, des concerologues, des dépendeurs d'audouilles, des décrocheuses de timbales, de pendus, d’astres, de mauvaises notes, des metteurs de moral à mille, des confondeurs de torchettes et de servions, des repasseuses dans un moment, des mégoteurs, des fumeurs de jardins défendus, des comédiennes del arte. Des ouvrières inqualifiables, des tourneuses en rond, des infermières en milieu rural, des commissaires non prisés, des avocats bien mûrs, des arpettes avec bac plus douze, des voyantes aveugles, des empereurs manchots, des marins marathoniers, des artistes comptant pour rien. Des cheminotes de guichet, des routiers increvables, des repêcheurs de bateaux morts, des employés de pompes funestes, des gardiens de la paix dans le monde, d’illimités militants, des juges pas encore rompus, des bâtisseuses de cathéters. Des cinquantaines de timides rugissants, et le dernier au fond de la casse, près du radiateur en fonte, l’ange du paradis défiscalisé, le valet laveur de dame de carreau, valet de cour, de corps, le navigateur d’eaux troubles, l’orpailleur criblant l’eau de vaisselle, le chasseur débrouillard bredouillant. La singularité du moutonnier, le charpentier qui glisse sur la mauvaise pente, le bûcheron de Noël, le géomètre a penser ce qu’il veut, l’incrédule invétéré, le multiplicateur de brioches, la tombeuse de cordes, toutes les nuances du nuagier, celui qui installe du soleil aux rayons, le lunatique, l'inventeuse de météologismes, le primitif peignant ses singes, le dépatronneur de patrons. Tous les courants alternatifs, sans oublier les perçeuses de coffres-faibles, les arrosés arroseurs, les ferrailleurs à fleurets mouchetés, les bombeuses de torses et de tags, des accordeurs de bénéfice du doute, des balayeurs devant les portes, des sécheurs de pleurs, des retrouveuses de sourire, des voix désaccordées. Des souffleurs de vers, des cacheurs d’arbres dans les forêts, des espèces d’épiciers, des charcutiers charogne, des boulangers non boulangistes, des chasseuses de marées, des chausseurs de Cendrillons, des comptines à la bouche des comptables, des qui forcepsent l’avenir. Toutes celles et ceux qu’il nous faut, les gens libres qui n’arbitrent rien, les divulgueurs pas vulgaires pour un sou ni pour cent, les abriteurs de pauvres hères, ceux qui ensemencent de la vie, dans la terre, dans des terrains de chair, les arroseuses de graines…
On aura besoin de toutes, de tous, de tout...